Maxime et Olivier, créateurs de dispositifs contraceptifs

Maxime et Olivier ont conçu des dispositifs contraceptifs masculins basés sur le principe de la remontée testiculaire. Ces nouveaux outils interrogent le rôle du monde médical dans le développement de la contraception masculine.

source thoreme.com

La contraception masculine existe en France depuis les années 1980 avec l’Association pour la Recherche et le Développement de la Contraception Masculine [ARDECOM]. Deux médecins ont mis au point des contraceptions, l’une hormonale et l’autre thermique. Validées par l’Organisation Mondial de la Santé [OMS], ces deux méthodes restent néanmoins peu accessibles. De fait, l’intérêt n’atteint pas le grand public. Il faut attendre la nouvelle vague féministe pour que la contraception masculine revienne titiller l’esprit des messieurs, comme Maxime et Olivier.  Ils se sont penchés sur la contraception masculine et s’en sont emparés. 

« Ma partenaire ne voulait pas prendre d’hormones et se faire poser un stérilet. Du coup j’ai fait un tour sur internet et je suis tombé sur ARDECOM. » se souvient Maxime Labrit, 37 ans, infirmier en EHPAD à Bordeaux. Il a vite été convaincu par la méthode thermique proposée par le Docteur Mieusset, qui permet de remonter les testicules. 

Le Docteur toulousain prescrit un slip sur mesure, dans lequel est creusé un trou pour faire sortir la verge et le scrotum (peau qui entoure les testicules). Les bijoux de familles sont à la température du corps, cessant la production de spermatozoïdes. 

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De fil en aiguille

Cependant, pour se faire prescrire un slip contraceptif, il faut aller à Toulouse. Pour Maxime, cette démarche était trop compliquée. « De fil et en aiguille je me suis dit : Est-ce qu’un anneau ne suffirait pas ? » Il se rend dans un magasin de bricolage pour trouver des anneaux de plomberie. « Je suis assez créatif comme garçon. » Il tente l’expérience ainsi. Le trou cousu dans le slip devient l’anneau de plomberie.  Son dispositif, aussi rudimentaire soit-il, a marché. 

L’Andro-swicht

L’infirmier décide de perfectionner son modèle en se rendant dans un FabLab. Pour ne pas créer de trouble, Maxime déclare vouloir créer «  un moule à bracelet ». Après des dizaines et des dizaines d’essais, le Bordelais parvient à réaliser son premier : Andro-swicht, un anneau en silicone adhésif. 

Il l’utilise en suivant le protocole du docteur Mieusset : port de l’outil 15 heures par jour pour que la spermatogenèse se mette en veille avec un suivi médical pour la prescription et lecture des spermogrammes. Les résultats sont concluants, Maxime est contracepté au bout de trois mois. Il décide de partager sa découverte en vendant ses Andro-swichts sur un site internet.

Marthe Voegeli

Olivier Nagot a découvert la Contraception Masculine Thermique [CMT] un peu par hasard en 2013. « J’avais entendu les histoires des caleçons serrés qui altèrent la fertilité masculine. Pour moi ce n’était que des on-dit. Et puis, je suis tombé sur les travaux de Marthe Voegeli. »

Marthe Voegeli était une physicienne suisse dans les années 1930. Dans son hôpital privé, elle a mené une expérience sur la contraception masculine par la chaleur. Les neuf volontaires devaient prendre un bain par jour de quarante-cinq minutes à 46.7°C pendant trois semaines. Ces patients étaient infertiles pendant six mois après quoi ils retrouvaient leur spermatogénèse initiale.

Le Spermapause

« J’ai vérifié sur moi-même de façon artisanale avec des chaufferettes. » Les résultats étant concluants, il se lance dans la conception d’un slip chauffant, le Spermapause.  Cet outil est un boxer composé d’une chaufferette au niveau scrotum relié par un fil à une batterie cousue dans le slip. Il faut le porter tous les jours, pendant quatre à six heures à une température entre 39 et 40°C. « Pour que l’effet contraceptif fonctionne, il faut que la chaleur atteigne les testicules. explique l’ingénieur en informatique, Il y a trois niveaux de chaleur proposés. Je déconseille les 38 et 37°C trop proches de la température corporelle. »

Une idée farfelue

Quand Olivier essaie son dispositif, il a plusieurs partenaires sexuels. « Elles ont réagi avec étonnement. Une en particulier était sceptique. » Pour les rassurer, Olivier montre ses spermogrammes. « Il faut en faire un au bout de six semaines après avoir commencé le Spermapause. » 

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Au bout d’un certain temps, Olivier constate la réussite de son dispositif home made. Il partage avec « beaucoup d’enthousiasme sa découverte » qui est reçue avec désintérêt pour ses amis masculins. Pour eux ce n’est pas leur ami Olivier qui allait trouver LA contraception masculine, « Ils trouvaient ça farfelu. » Pour autant, l’ingénieur francilien crée un site et commence à vendre son dispositif.

Aucune étude

D’un côté un Bordelais vend des anneaux sportswears pour se contracepter et de l’autre un Francilien lance sa marque de sous-vêtements prêt à porter contraceptifs. Chacun d’eux connaissent leur petit succès et ne tardent pas à se faire remarquer des membres d’ARDECOM. Daniel Aptekier-Gielibter co-président ARDECOM reste dubitatif face à ces nouveaux inventeurs. «Ça reste des choses expérimentales, il n’y a aucune étude sur leur efficacité » regrette le militant.

Des études, Olivier en a faites, du moins sur trois cobayes. Et puis « en novembre dernier, l’ANSM [l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé] s’est manifestée en me disant, “vous vendez un dispositif médical” » se souvient l’ingénieur. Il assure à qui veut l’entendre que son dispositif n’est pas médical, comme Maxime. Le créateur de l’Andro-switch s’explique « Il n’y a pas de distinction entre une contraception invasive ou pas. Un slip ou un anneau, c’est extérieur, on est sur un outil mécanique.»

Pour que leurs produits reçoivent un certificat de conformité de l’ANSM, il faut qu’ils présentent des dossiers sur les fonctionnements de leurs inventions, puis que des laboratoires indépendants testent leurs dispositifs. Et pour ça, « il faut débourser 20 000€ » soupire Maxime.

Bouger les lignes

Olivier a renoncé à la vente du Spermapause suite à la sollicitation de l’ANSM. Pour Maxime en revanche, le géant pharmaceutique ne lui fait pas peur. « Non, je ne travaille pas dans l’illégalité, assure t-il, mon anneau n’est pas contraceptif. C’est la chaleur qui l’est. » Une prise de position qui fait grincer des dents, « Je trouve ça un peu cavalier. S’indigne le coprésident d’ARDECOM. On présente des outils non validés et finalement ce sont les femmes qui en paieront le prix. »

Olivier, quant à lui, salue le courage de son homologue bordelais, « depuis que Maxime est arrivé avec son dispositif, il fait bouger les lignes ». Pour les deux inventeurs, la question est bien là. Mettre en avant un dispositif qui devrait être connu de tous. « Je me suis rendu compte que s’il y avait une pilule pour homme quand j’étais plus jeune, je l’aurais prise. » analyse Olivier. « Pour moi la contraception n’est plus genrée, c’est de l’humanité » assure Maxime, avant d’ajouter « Il faut passer de la croyance à la réalité »

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